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Les droits de la Nature : sortir d’une logique d’usage, bâtir des relations justes avec le Vivant

couverture du rapport IHEST Droits de la Nature

Comment sortir du statu quo qui transforme la Nature en simple "ressource" ?


Face aux crises écologiques et sociales systémiques que nous traversons, la note rédigée par Wild Legal dans le cadre du cycle "Usage des terres et des mers, quelle trajectoire pour quelle société ?" de l'Institut des Hautes Etudes pour la Science et la Technologie (IHEST) propose un changement radical de paradigme.


En s’appuyant sur les concepts et outils des droits de la Nature, mais aussi sur les rapports de l’IPBES et les expérimentations menées sur le terrain, cette note éclaire une autre voie possible, respectueuse du Vivant.


Cette note invite à repenser notre cadre légal et politique pour passer d’une gestion des « ressources naturelles » à une véritable cohabitation avec les autres vivants. Cela implique non seulement de transformer notre droit, mais aussi de revoir en profondeur nos valeurs, notre gouvernance et notre manière de définir l’intérêt général.



Une critique du droit actuel : chosification, utilitarisme, impasses


Aujourd’hui, l'ensemble de notre modèle sociétal, notre économie et même notre droit de l’environnement se sont bâtis sur un postulat simple : l’être humain au centre, la Nature autour comme ressource à exploiter, paysage à aménager ou bien commun à partager. Cette conception découle d’une tradition anthropocentrée, héritée de notre histoire politique, économique et spirituelle.


Même si le préjudice écologique a été reconnu dans la loi de 2016, il reste appréhendé de manière objective, souvent sous-évalué par la jurisprudence, et ne permet pas une protection réelle des milieux. La Nature demeure un « objet » juridique et non un sujet de droit.


Ce cadre, pensé pour gérer les usages humains des milieux naturels, se montre aujourd'hui inadapté pour prévenir les atteintes ou garantir une réparation juste. Il maintient une logique de rentabilisation à court terme, où les intérêts économiques pèsent plus lourd que l’intégrité des écosystèmes, alors même que ce déséquilibre structurel menace aujourd'hui l'habitabilité de nos territoires et les droits humains les plus essentiels.


Les droits de la Nature : un changement de regard et de statut


Reconnaître les droits de la Nature, c’est opérer un changement profond : ne plus voir la Nature comme un stock de matières premières, mais comme une communauté vivante dont nous faisons partie. Les écosystèmes, espèces et entités qui composent le Vivant à nos côtés, deviennent des sujets de droit, avec la capacité d’être défendus pour dans leurs droits et leurs intérêts propres.


Cette approche n’est pas théorique : elle se déploie déjà à travers le monde.

  • En Équateur, la Constitution reconnaît la Nature comme sujet de droits, protégeant ses cycles vitaux et sa régénération. Ces droits sont opposables aux activités humaines, et permettent de limiter les activités industrielles extractives.

  • En Nouvelle-Zélande, le fleuve Whanganui est reconnu comme une entité indivisible et vivante.

  • En Espagne, la lagune du Mar Menor bénéficie d’une personnalité juridique, permettant à tout citoyen de défendre ses droits en justice.


Ces nouveaux statuts juridiques ne sont pas symboliques. Ils modifient les pratiques institutionnelles, transforment la gouvernance locale, et instaurent une culture du respect et de la réciprocité envers le Vivant. Ils permettent aussi de mieux arbitrer les conflits d’usage en intégrant la voix des écosystèmes dans les décisions.



Une nouvelle manière de régler les conflits


Dans le cadre actuel, les conflits environnementaux sont souvent tranchés au bénéfice des intérêts économiques ou industriels, reléguant la protection des milieux au second plan. Les droits de la Nature proposent un autre cadre : celui d’une pondération équilibrée entre les besoins humains et les besoins des autres vivants, dans une perspective de destin commun.


Cette approche repose sur des principes inspirés notamment de la jurisprudence équatorienne :


  • Seuil de tolérance écologique : ne pas dépasser la capacité d’un milieu à se régénérer.

  • Proportionnalité des atteintes : plus l’impact est grave pour l’écosystème, plus il doit être justifié par un besoin vital humain.

  • Principe d’interprétation inter-espèces : adapter la protection juridique aux caractéristiques propres de chaque espèce ou écosystème.


Vous découvrirez dans la note d'éclairage comment, en pratique, cela permet de mieux prévenir les atteintes irréversibles, de hiérarchiser les usages, et de garantir que certaines activités ne puissent pas se développer si elles compromettent la survie ou l’intégrité des milieux.


Gouverner avec le Vivant : vers une transition juridique et éthique


Les droits de la Nature ne sont pas qu’une réforme du droit : ils impliquent un changement dans la manière de gouverner. Intégrer les autres vivants dans les cercles de décision, c’est aussi repenser l’aménagement du territoire, la gestion de l’eau, l’urbanisme, ou encore l’agriculture à partir des besoins réels des écosystèmes.


Wild Legal met déjà ces principes en œuvre :


  • Dans le Parc naturel régional du Massif des Bauges, un programme de recherche explore comment donner voix aux autres qu’humains dans la gouvernance du parc.

  • Avec le Réseau des Réserves Naturelles de France, un travail est mené pour intégrer les droits de la Nature dans la gestion et la législation des espaces protégés.

  • Sur le terrain, l’association soutient des mobilisations locales (comme celle pour la cascade du Vegay) en défendant les droits d'écosystèmes affectés.


Ces expérimentations montrent qu’une gouvernance écocentrée est possible, et qu’elle peut être conçue de manière claire, structurée et compatible avec les exigences institutionnelles.


Marche pour l'Océan à la Conférence des Nations Unies, juin 2025, Nice
Marche pour l'Océan à la Conférence des Nations Unies, juin 2025, Nice.

Les propositions concrètes portées par Wild Legal


Pour transformer l’essai, la note d'éclairage formule des recommandations précises :


  1. Constitutionnaliser les droits de la Nature, pour leur donner un cadre stable et opposable.

  2. Créer un statut juridique adapté aux entités naturelles, leur garantissant des droits fondamentaux.

  3. Ouvrir l’intérêt à agir à toute personne ou collectivité souhaitant défendre le Vivant (actio popularis)

  4. Inclure les besoins des autres qu’humains dans toutes les décisions ayant un impact sur eux

  5. Redéfinir l’intérêt général pour y inclure explicitement l’habitabilité et le droit à la dignité des milieux

  6. Expérimenter des gouvernances écocentrées, à l’échelle locale et nationale.

  7. Former décideurs et acteurs économiques à ces principes et à leur mise en pratique.


Conclusion : une voie pour les transitions


Le mouvement des droits de la Nature répond à une double urgence : écologique et sociale. En redonnant une place juridique au Vivant, il ne s’agit pas seulement de mieux protéger les écosystèmes, mais aussi de garantir un avenir commun aux générations humaines et non humaines.


Ce n’est pas une utopie lointaine : c’est une voie concrète, expérimentée, documentée, et déjà mise en œuvre dans d’autres pays. En France, nous avons l’opportunité de faire évoluer notre droit et nos institutions pour sortir d’une logique d’usage et entrer dans une logique de cohabitation juste et durable.


📥 Téléchargez la note complète :



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