COP15 Biodiversité, la Terre Mère et les peuples autochtones à l’honneur
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COP15 Biodiversité, la Terre Mère et les peuples autochtones à l’honneur


Au Canada, a été adopté le 18 décembre dernier un accord mondial historique visant à créer un plan pour protéger et restaurer la biodiversité jusqu'en 2030. Celui-ci énonce explicitement que le nouveau Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal reconnaît et considère “les droits de la nature et les droits de la Terre nourricière, comme faisant partie intégrante de la réussite de sa mise en œuvre”. Cette nouvelle est une formidable victoire pour les ONG impliquées depuis trois ans pour y intégrer les concepts des droits de la nature. Wild Legal est fier d’avoir soutenu ces efforts aux côtés d’environ 200 organisations et individus de plus de 40 pays.

C’est un premier pas important. Les négociateurs du texte ont indiqué que, dans les États ayant reconnu les droits de la nature, cette évolution juridique constitue une démarche essentielle à la protection de la biodiversité.

Cette disposition n’est pas étendue à l’ensemble des états dans le monde, notamment en raison de la volonté des rédacteurs de préserver la souveraineté des états et d’intégrer “des systèmes de valeurs différents”, selon lesquels “la nature incarne différents concepts pour différentes personnes, notamment la biodiversité, les écosystèmes, la Terre nourricière et les systèmes de vie”.

Comme le précise le communiqué de presse du Earth Law Center, les délégués boliviens ont défendu l'inclusion dans l’accord cadre des droits de la nature et des droits de la Terre mère avec le soutien de l'Équateur et de la Nouvelle-Zélande (trois pays ayant reconnu les droits de la nature dans leur législation nationale), tout en négociant avec les pays qui s'opposaient initialement au texte (Argentine, Japon, UE, Australie, entre autres). L'opposition provenait en grande partie de pays déclarant que leurs systèmes juridiques n'avaient pas de lois similaires, mais les négociateurs sont finalement parvenus à un consensus sur le texte final.

"Ce que nous avons vu jusqu'à présent dans la conservation au niveau international, c'est que nos valeurs, ou la façon dont nous apprécions la nature, déterminent l'efficacité avec laquelle nous protégeons et restaurons la biodiversité", a déclaré Rachel Bustamante, analyste des sciences et des politiques de conservation pour le Earth Law Center, qui a co-dirigé une « délégation des droits de la nature » ​​de la société civile à la COP-15.


Le document final adopte 23 objectifs de conservation ainsi que des orientations pour leur mise en œuvre. Il reconnaît la place essentielle des peuples autochtones, soulignant leur rôle de “gardiens de la biodiversité et partenaires dans la conservation, la restauration et l'utilisation durable”.

Le cadre souligne que “le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal […] définit un plan ambitieux visant à mettre en œuvre une action de grande envergure pour transformer la relation de nos sociétés avec la biodiversité d'ici à 2030 […] et faire en sorte que, d'ici à 2050, la vision commune de vivre en harmonie avec la nature soit réalisée.”

Pour l’accord cadre, un monde de vie en harmonie avec la nature, se traduit par un monde où : « d'ici à 2050, la biodiversité est appréciée, conservée, restaurée et utilisée avec sagesse, ce qui permet de maintenir les services écosystémiques, de préserver la santé de la planète et de procurer des avantages essentiels à tous les peuples ».

Un objectif traduisant un changement radical de relation au monde. Alors que jusqu’ici le modèle dominant traduit une relation à la nature marquée par l’exploitation à outrance des “ressources naturelles”, l’objectivation des êtres vivants, animaux et végétaux et le dépassement des limites planétaires, cette révolution sociétale passe nécessairement par de nouveaux mécanismes légaux, encadrant et garantissant un équilibre entre besoins humains et intérêts essentiels de la nature.


Biodiversité et villes


L’accord cadre souligne également dans sa cible 12, l’objectif d’accroître sensiblement la superficie, la qualité et la connectivité des espaces verts et bleus dans les zones urbaines et densément peuplées, ainsi que l'accès à ces espaces et les avantages qu'ils procurent de manière durable, en intégrant la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité et en garantissant une planification urbaine intégrant la biodiversité, en renforçant la biodiversité indigène, la connectivité et l'intégrité écologiques, en améliorant la santé et le bien-être de l'homme et son lien avec la nature, et en contribuant à une urbanisation inclusive et durable et à la fourniture de fonctions et de services écosystémiques.”

Un objectif que partage Wild Legal qui a notamment participé à la consultation sur la révision du Plan local de Paris afin de plaider en faveur d’une nouvelle relation à la biodiversité en ville.

Cahier d'acteur Wild Legal
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Financements

L’accord cadre prévoit dans sa cible 19 f), d’augmenter substantiellement et progressivement le niveau des ressources financières [...] pour mettre en œuvre les stratégies et plans d’action nationaux pour la biodiversité, en mobilisant d'ici à 2030 au moins 200 milliards de dollars US par an.

Ces budgets représentent le triple de l’aide internationale actuelle pour la biodiversité. La COP15 a également approuvé la création d'un nouveau fonds, sous le Fonds mondial pour l'Environnement (FEM), qui sera dédié à l'application de l'accord de Kunming-Montréal.


Le cadre prévoit notamment de renforcer “le rôle des actions collectives, notamment celles des populations autochtones et des communautés locales, des actions centrées sur la Terre nourricière et des approches non fondées sur le marché, y compris la gestion communautaire des ressources naturelles et la coopération et la solidarité de la société civile, en vue de la conservation de la biodiversité”.

L’accord précise que les actions centrées sur la Terre nourricière comprennent une “approche écocentrique et fondée sur les droits permettant la mise en œuvre d'actions visant à établir des relations harmonieuses et complémentaires entre les peuples et la nature, à promouvoir la continuité de tous les êtres vivants et de leurs communautés et à garantir la non-marchandisation des fonctions environnementales de la Terre nourricière.”


Conclusion


"Les droits de la nature dans ce traité international contribueront à encourager une approche proactive et bienveillante de la conservation, à travers laquelle la société considère les intérêts et les besoins de la biodiversité au-delà des avantages que les humains en tirent. Cela fait certainement défaut à la majorité des décideurs, mais est fondamental dans la compréhension et les systèmes de gouvernance de nombreux peuples autochtones. Le fait que le traité nous encourage désormais à apprendre et à travailler avec des systèmes de valeurs différents démontre que les dirigeants sont prêts à utiliser de nouveaux outils pour prévenir une nouvelle perte de biodiversité” souligne Rachel Bustamante, pour le Earth Law Center.


Pour Wild Legal, il est clair que l’adoption de ce nouveau texte à l’échelle internationale est une première et certainement une étape décisive pour inspirer de nombreux autres États dans la reconnaissance et la traduction des droits de la nature dans leur législation nationale.




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