ACTUALITÉ | Le scandale du mercure en Guyane française exposé à la COP-5 de Minamata
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ACTUALITÉ | Le scandale du mercure en Guyane française exposé à la COP-5 de Minamata



Ce mercredi 4 octobre 2023, Linia OPOYA, présidente de l’association des victimes du mercure sur le Haut-Maroni, s’est rendue à Brasilia (Brésil) pour porter la voix des habitant·e·s et des écosystèmes victimes du mercure sur les rives françaises du fleuve Maroni. A l’occasion d’une réunion des leaders autochtones du continent sud-américain concernant l’élimination du mercure dans les exploitations minières, Linia a attiré l’attention sur la situation en Amazonie française où persiste l’orpaillage illégal depuis 30 ans, entraînant des pollutions chroniques et des taux de contamination mercurielle vertigineux. Wild Legal revient sur cette rencontre fondamentale et ses enjeux.


2023, les 10 ans de la Convention de Minamata sur le mercure


La 5ème Conférence des Parties de la Convention de Minamata sur le mercure (COP-5) se déroulera du 30 octobre au 3 novembre 2023 et sera l’occasion de célébrer les 10 ans de l’adoption de ce texte juridique fondamental.


En effet, cette convention internationale a été adoptée le 10 octobre 2013 à Kumamoto (Japon) sous l’égide du Programme des Nations-Unies pour l’environnement (PNUE), afin de protéger la santé humaine et l’environnement contre les émissions et rejets anthropiques - d’origine humaine - de mercure et de composés du mercure. Elle a été baptisée du nom de Minamata en référence à la ville éponyme japonaise, dans laquelle s’est déroulée dans les années 1950 une des plus grandes catastrophes sanitaires et écologiques. Tout un écosystème et des milliers de personnes humaines ont été empoisonnés par des effluents industriels de mercure rejetés pendant trente ans par l’usine d'engrais chimiques CHISO, implantée dans la baie de Minamata. Celle-ci a également donné son nom à une pathologie sévère, la maladie de Minamata, qui décrit des symptômes physiques et neurologiques graves et permanents, surtout via l’intoxication de mercure in utero


128 États signataires ont ainsi exprimé en 2013 leur volonté de ratifier la convention afin d’interdire progressivement l’ensemble des rejets et émissions anthropiques de mercure sur leur territoire.



Pour atteindre l’objectif d’élimination de tous les rejets et de toutes les émissions de mercure de provenance humaine, plusieurs types d’obligations s’imposent aux États parties de la Convention :

  • des interdictions progressives de produits contenant du mercure,

  • des obligations en lien avec les activités d’extraction de mercure,

  • des mesures sur l’usage, le commerce, les émissions et le traitement des déchets contenant du mercure,


A NOTER : En ce qui concerne le territoire français, l’utilisation du mercure pour l’exploitation aurifère en Guyane fut interdite à compter du 1er janvier 2006 par un arrêté du 8 juin 2004 “considérant les risques de contamination des écosystèmes par le mercure en Guyane et ses conséquences sur la santé des populations et celle des travailleurs affectés à l’activité aurifère, [et] considérant l’existence de procédés alternatifs performants n’utilisant pas de mercure pour la séparation de l’or des concentrés, déjà opérationnels en Guyane et disponibles actuellement sur le marché '''.

L’encadrement juridique de l’exploitation minière aurifère


L’exploitation minière artisanale et à petite échelle de l’or (ASGM) constitue un secteur crucial à réguler pour rendre effectives les ambitions de la convention de Minamata dans le monde.


C’est pourquoi l’article 7 de la Convention oblige “chaque Partie sur le territoire de laquelle sont menées des activités d’extraction minière et de transformation artisanales et à petite échelle d’or (...) [à prendre] des mesures pour réduire et, si possible, éliminer l’utilisation de mercure et de composés du mercure dans le cadre de ces activités ainsi que les émissions et rejets consécutifs de mercure dans l’environnement”. “Les Parties déclarant avoir des pratiques « plus que négligeables » d'orpaillage utilisant du mercure sur leur territoire devront mettre au point des plans d'action nationaux visant à réduire ces usages de mercure et à réguler le commerce domestique de mercure destiné à cet usage.”


Étant donné que le mercure est considéré comme simple d’utilisation et peu coûteux, les mines d’or artisanales et à petite échelle (légales ou illégales) l’utilisent dans des quantités considérables et exponentielles à travers le monde, et notamment sur le continent sud-américain.


L’on estime ainsi à 727 tonnes, les rejets de mercure annuels provenant des ASGM, dont 13 tonnes annuelles au moins proviennent du seul territoire français de Guyane.


Malgré le cadre légal français interdisant sans exception l’usage du mercure dans les mines d’or, la substance toxique - achetée dans les pays frontaliers - demeure massivement utilisée sur la grande majorité des sites de Guyane, exploités illégalement.


L’exemple de la Guyane française révèle ainsi le besoin urgent de renforcer les mesures de suivi relatives à la prohibition du mercure dans les ASGM et d’éradiquer les activités illégales d’ASGM.


Il révèle par ailleurs la nécessité de généraliser au sein de tous les Etats frontaliers la prohibition de l’usage du mercure dans les ASGM.


Rassembler les leaders autochtones face au besoin urgent de renforcer les obligations relatives aux mines d’or.





Les peuples autochtones de Guyane vivent sur la ligne de front du pillage minier de l’Amazonie française. La prise en compte de leur voix, de leurs connaissances de terrain et de leurs revendications est indispensable pour lutter efficacement contre l’orpaillage illégal et mettre un terme définitif à l’utilisation du mercure sur le sol français.


L’exemple du territoire de Guyane et des carences de l’État français dans son application de la Convention démontre que les actions doivent être renforcées ainsi que le suivi de leur application.


La présence de Linia OPOYA lors de cette conférence a ainsi permis d’alerter sur la situation guyanaise et de rappeler qu’un plan d’urgence doit immédiatement intervenir sur le sol français.


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